Tout comme la notion de « service public », celle de « police » dispose d’un sens matériel et d’un sens organique :
- Au sens matériel, la police correspond à l’ensemble des mesures concourant à une organisation rationnelle de l’ordre public dans un groupe social ;
- Au sens organique, elle renvoie à l’ensemble des organes et institutions de la force publique, chargés d’assurer le maintien de l’ordre public en empêchant que des infractions soient commises et en recherchant, constatant et permettant de réprimer celles qui le sont.
En droit administratif, et comme pour la notion de service public, c’est d’abord au sens matériel que la notion de police renvoie, non à l’institution.
De manière schématique, la police correspond donc aux activités de maintien de l’ordre, celui-ci étant le but particulier d’intérêt général du service public qu’est la police. La police est d’ailleurs un service public qui ne peut être délégué, l’État et les collectivités territoriales devant normalement le prendre en charge en régie directe, même si la loi du 13 août 2004 admet que les maires puissent transférer certains de leur pouvoir de police aux présidents du ou des établissements publics de coopération intercommunale auquel leur commune participe. On admet également que des personnes privées puissent y être associées, ainsi la loi du 18 mars 2003 permet de confier le contrôle des bagages et palpations de sécurité à des personnes privées dans les aéroports et à l’entrée des stades. Cette question de l’autorité chargée du pouvoir de police est un enjeu fondamental dans un État libéral, dès lors que cette activité touche directement aux droits et libertés des individus.
Même si elles sont liées, la police n’est pas la justice. En décembre 1789, le constituant Adrien Duport soulignait ainsi que « Deux institutions distinctes renferment les moyens de garantir aux hommes la liberté, la propriété, l’honneur et la vie. Ces deux institutions sont la police et la justice ». Il complète en affirmant que « [t]out ce qui concerne les moyens de prévenir les délits, de rétablir l’ordre d’une manière prompte, de saisir et d’arrêter ceux qui l’ont troublé, appartient à la police. Tout ce qui concerne les moyens de vérifier les faits qui donnent lieu à la poursuite et d’y appliquer la loi appartient essentiellement à la justice ».
On peut aujourd’hui organiser la notion de police autour de deux distinctions : celles entre les ordres de police et celles entre les activités de police.Ainsi, en matière de police, on retrouve deux types d’activité :
- l’édiction de règlements et décisions individuelles d’une part ;
- les opérations matérielles d’autre part.
De même, il existe également deux ordres de police, dans une distinction qui ne recoupe pas celle des activités (nous allons y revenir) :
- d’un côté on trouve donc la police judiciaire, au sens de tout ce qui a un lien avec une infraction pénale ;
- de l’autre la police administrative, celle qui va spécialement nous intéresser ici.
Deux évènements ont d’ailleurs récemment remis sur le devant de la scène médiatique la notion de police administrative : les manifestations des gilets jaunes et la pandémie de la COVID-19. Toute mesure d’interdiction d’une manifestation pour risque de trouble à l’ordre public est une mesure de police administrative. De même, l’utilisation d’un LBD (les flashballs) ou d’une grenade de désencerclement pendant une manifestation est une opération s’inscrivant dans une action de police administrative. Lorsqu’en décembre 2020, le Conseil d’État confirme l’illégalité de la surveillance policière par drones en l’absence d’encadrement législatif, il juge illégale une mesure de police administrative (CE, 22 déc. 2020, La Quadrature du Net). Le même jour, il confirme en revanche la légalité du décret du Premier ministre mettant en place le confinement, là encore une mesure de police administrative (CE, 22 déc. 2020, Gilles Guyon et autres).
Comprendre l’action de l’administration au titre de la police administrative implique tout d’abord de comprendre la notion même de police administrative (I), puis d’étudier son organisation (II) et l’étendue des pouvoirs de police (III)
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