Droits fondamentaux

Les notions d’intention et d’arbitraire en matière d’usage de la force meurtrière par l’Etat

Alors que l’on commémorait hier le triste jour du 17 octobre 1961 qui vit mourir tant d’algériens sous les coups des forces de l’ordre françaises1, il semble indispensable de revenir sur le droit à la vie tel que protégé conventionnellement, et notamment sur les notions d’intention et d’arbitraire en lien avec l’usage de la force meurtrière par l’Etat.

Initialement posé contre le droit du souverain de faire mourir – cette utilisation de la force létale par les agents de l’Etat –, le droit à la vie voit ses contours évoluer lentement. Protégé conventionnellement2 depuis l’entrée en vigueur du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de son article 6, on trouve mention du droit à la vie tant au niveau régional – CEDH3, Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne4, CIADH5 ou CADH6 – qu’au sein de conventions spéciales, tels à l’article 9 de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille7, à l’article 10 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées8, ou encore au paragraphe 11 de la Déclaration des droits de l’Homme de l’ASEAN9. Il est parfois lié « à la liberté et à la sûreté de sa personne »10 ou à l’inviolabilité de la « personne humaine »11, voire protégé « en général à partir de la conception »12 – visant ici un « droit » à la vie de l’embryon.

Ainsi, lorsque le Comité de droits de l’Homme ou la Cour européenne des droits de l’Homme parlent de ce droit, respectivement, comme le « le droit suprême de l’être humain »13 ou comme « la valeur suprême dans l’échelle des droits de l’Homme »14, faut-il encore y voir la seule protection contre la force létale souveraine ? De manière étonnante, les Etats-Unis avaient spécialement proposé que la « mort infligée au cours d’une expérience médicale volontairement consentie » et la « mort infligée au cours d’une opération chirurgicale en l’absence de négligence ou de faute grave » soient inscrites au nombre des restrictions possibles au droit à la vie tel que protégé par le PIDCP15. Si aucune de ces exceptions n’a été intégrée à l’article final, elles soulignent toutefois que les Etats envisageaient déjà une application assez large du droit à la vie. Dans les rapports entre les individus et les Etats, les différents articles protégeant ce droit sont ainsi tous porteurs, au minimum, d’une obligation négative pour les Etats de ne pas porter directement et « arbitrairement », voire « intentionnellement »16 atteinte à la vie des personnes placées sous leur juridiction17.

Tant le PIDCP que la CADH ou la CIADH indiquent ainsi au premier alinéa de leur article sur le droit à la vie que « nul ne peut être arbitrairement privé de la vie / de ce droit [CADH] ». L’article 2 de la CEDH utilise une phrase similaire mais où l’adverbe « arbitrairement » a été remplacé par « intentionnellement ». Dans ces différents textes, cette phrase matérialise la principale, voire la seule, obligation négative des Etats au titre du droit à la vie. Et par leur présence, ces adverbes viennent limiter la portée de cette obligation qui sinon aurait un caractère absolu, le droit à la vie étant considéré comme un droit indérogeable par ces différentes conventions18 – à l’exception de la Charte africaine qui ne contient aucune clause dérogatoire.

On retrouve les termes « arbitrairement » et « intentionnellement » au sein des discussions sur la rédaction du PIDCP. Le premier était porté par la délégation des Etats-Unis19, tandis que le second avait le soutien privilégié du Royaume-Uni. Se basant sur la définition commune du mot arbitraire, à savoir « qui dépend de la volonté, du bon plaisir de quelqu’un et intervient en violation de la loi ou de la justice »20, les Etats-Unis avançaient que son utilisation permettait d’indiquer que des exceptions limitatives étaient possibles, telles la peine de mort ou la légitime défense21. Mais pour le Royaume-Uni, le terme « intentionnellement » était plus « clair et précis »22.

Si c’est finalement le mot « arbitrairement » qui a eu les faveurs de la Commission des droits de l’Homme23, sa signification juridique reste encore assez floue. Certains représentants y voient l’expression d’une exception au droit à la vie au titre d’une prévision légale, rien ne permettant alors à la Communauté internationale de juger de la légitimité d’une telle norme de droit interne24. D’autres, rejoignant la proposition initiale du Royaume-Uni, affirment que l’arbitraire implique une intention, et donc que la clause ne peut couvrir les morts non-intentionnelles25. Quelques-uns enfin, incluent un élément éthique dans la notion d’arbitraire, devant interdire toute mort illégale et injuste26. Au final, cette tâche de définition fût renvoyée au futur organe de suivi du pacte27. Mais, avant 2015 et le projet de nouvelle observation générale du Comité des droits de l’Homme portant sur le droit à la vie, aucune des deux observations générales précédentes ne définissait le mot arbitraire28. Seule son observation générale sur le droit au respect de la vie privée venait en partie préciser cette notion. Le Comité y affirme ainsi que « l’introduction de la notion d’arbitraire a pour objet de garantir que même une immixtion prévue par la loi soit conforme aux dispositions, aux buts et aux objectifs du Pacte et soit, dans tous les cas, raisonnable eu égard aux circonstances particulières »29. En septembre 2015, la deuxième révision du projet d’observation générale n° 36 vient finalement déclarer que

« The notion of “arbitrariness” is not to be equated with “against the law”, but must be interpreted more broadly to include elements of inappropriateness, injustice, lack of predictability, and due process of law as well as elements of reasonableness, necessity, and proportionality »30.

Développant les propos de l’observation générale sur le droit à la vie privée, cette définition de l’arbitraire rejoint alors la vision défendue par le Chili et le Royaume-Uni en 1950. Elle s’inscrit dans une vision éthique du respect du droit à la vie, au-delà d’une simple approche légaliste. En ce sens, le Comité semble également s’être inspiré des travaux de la Commission interaméricaine des droits de l’Homme.

Pour cette dernière, en effet, la prévention de l’arbitraire au regard de la possible application de la peine de mort « requires a reasoned and judicially supervised sentencing process, which allows tor the differentiation of each specific case »31, c’est-à-dire que le processus qui a mené à la sentence doit respecter les règles d’un procès juste et équitable32, et donc s’inscrire plus largement dans un système général de légalité, ce que nous pourrions appeler une légalité systémique. Il est en ce sens possible de considérer que l’arbitraire ne se juge pas uniquement sur la légalité d’une atteinte spécifique, mais aussi au regard du cadre juridique d’édiction de la norme en cause33.

Au niveau européen, une lecture ordinaire du texte de la Convention a amené l’ancienne Commission à conclure, dans un premier temps, que seules les morts infligées de manière intentionnelle pouvaient se voir sanctionner au titre du droit à la vie34. Il est vrai que la deuxième phrase du premier alinéa est suffisamment claire pour ne laisser que peu de place au doute. La seule question était de savoir si cette mention d’une intention coupable avait contaminé le reste de l’article au point de faire échapper à la sanction du juge de Strasbourg toute mort non intentionnelle résultant d’une action des autorités étatiques.

En 1984, la Commission fait évoluer son interprétation pour juger que « les exceptions énumérées au paragraphe 2, notamment, indiquent que cette disposition ne vise pas exclusivement la mort infligée intentionnellement [mais aussi] les situations où il est permis d’avoir recours à la force alors même que cela peut aboutir à la mort, comme conséquence non prévue du recours à la force »35. Reprise par la suite par la Cour, notamment dans l’affaire McCann et autres c. Royaume-Uni de 199536, cette formule montre que la Cour fait en matière d’usage de la force une interprétation croisée des deux obligations matérielles mentionnées au premier alinéa de l’article 2, à savoir « l’obligation générale de protéger par la loi le droit à la vie et l’interdiction de donner la mort intentionnellement »37. C’est d’ailleurs la porte par laquelle se réinvite la notion d’arbitraire dans l’interprétation de l’article 2, la Grande chambre de la Cour considérant en 2004 dans l’affaire Makaratzis c. Grèce que si l’article 2 peut autoriser le recours à la force meurtrière, « [l]e non-encadrement par des règles et l’abandon à l’arbitraire de l’action des agents de l’Etat sont incompatibles avec un respect effectif des droits de l’homme »38. La Cour précise un an plus tard que « le droit national réglementant les opérations de police doit offrir un système de garanties adéquates et effectives contre l’arbitraire et l’abus de la force »39. La jurisprudence de la Cour semble alors avoir remplacé l’interdiction limitative de donner la mort intentionnellement par celle plus extensive de l’article 6 du PIDCP selon laquelle « [n]ul ne peut être arbitrairement privé de la vie ».

 

Pour citer ce post : Xavier Aurey, « Les notions d’intention et d’arbitraire en matière d’usage de la force meurtrière par l’Etat », Fondamentaux.org, 18 octobre 2018 [https://fondamentaux.org/?p=922]

  1. 17 octobre 1961 : « Ce massacre a été occulté de la mémoire collective », Le Monde, 17 oct. 2011 [https://www.lemonde.fr/societe/article/2011/10/17/17-octobre-1961-ce-massacre-a-ete-occulte-de-la-memoire-collective_1586418_3224.html]
  2. La Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 prévoit à son article 3 que : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne ».
  3. CEDH, art. 2.1 : « Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d’une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi ».
  4. Charte DF UE : art. 2.1. « Toute personne a droit à la vie ».
  5. CIADH, art. 4.1 : « Toute personne a droit au respect de sa vie. Ce droit doit être protégé par la loi, et en général à partir de la conception. Nul ne peut être privé arbitrairement de la vie ». Cette formulation plus large d’un droit au respect de sa vie pourrait autoriser la Cour africaine de droits de l’Homme à avoir une jurisprudence plus large que dans le cadre du « simple » respect du droit à la vie.
  6. CADH, art. 4 : « La personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à l’intégrité physique et morale de sa personne: Nul ne peut être privé arbitrairement de ce droit ».
  7. Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, adoptée par l’Assemblée générale dans sa résolution 45/158 du 18 décembre 1990, art. 9 : « Le droit à la vie des travailleurs migrants et des membres de leur famille est protégé par la loi ».
  8. Convention relative aux droits des personnes handicapées, 13 déc. 2006, A/RES/61/106, entrée en vigueur le 3 mai 2008, art. 10 : « Les États Parties réaffirment que le droit à la vie est inhérent à la personne humaine ».
  9. Déclaration des droits de l’Homme de l’ASEAN, 18 nov. 2012, § 11 : « Every person has an inherent right to life which shall be protected by law. No person shall be deprived of life save in accordance with law ».
  10. DUDH, art. 3.
  11. CADH, art. 4.
  12. CIADH, art. 4.1 : « Toute personne a droit au respect de sa vie. Ce droit doit être protégé par la loi, et en général à partir de la conception. Nul ne peut être privé arbitrairement de la vie ».
  13. CDH, 4 avr. 1985, Kanta Baboeram-Adhin et cons. c. Suriname, cas n° 146/1983 et 148 à 154/1983, U.N. doc. A/40/40, § 697.
  14. CrEDH, 22 mars 2001, Streletz, Kessler et Krenz c. Allemagne, req. 34044/96, 35532/97 et 44801/98, § 94.
  15. ONU, Commission des droits de l’Homme, Comité de rédaction, Projet de Pacte relatif aux droits de l’Homme, U.N. Doc. E/CN.4/AC.1/38, 17 mai 1948, art. 5, §§ 8 et 9.
  16. CEDH, art. 2.1.
  17. Même si les Etats-Unis récusent l’application extraterritoriale du PIDCP.
  18. PIDCP, art. 4.2 ; CEDH, art. 15.2 (exception faite des dérogations prévues par l’article 2 lui-même) ; CIADH, art. 27.2.
  19. ONU, Commission des droits de l’Homme, Projet de Pacte international relatif aux droits de l’Homme, U.N. Doc. E/CN.4/170/Add.5, 24 mai 1949. Refusée une première fois, l’introduction du mot « arbitrairement » a été proposée une nouvelle fois par les Etats-Unis [ONU, Commission des droits de l’Homme, Observations des gouvernements, U.N. Doc. E/CN.4/353/Add.l, 4 janv. 1950, p. 3] et par le Chili [ONU, Commission des droits de l’Homme, Projet de Pacte international relatif aux droits de l’Homme, U.N. Doc. E/CN.4/378, 29 mars 1950], puis par ces deux pays à la 8e session de la Commission des droits de l’Homme en 1952, et cette fois-ci finalement adoptée par dix voix contre cinq et trois abstentions [ONU, Commission des droits de l’Homme, Compte-rendu analytique de la 311e séance, U.N. Doc. E/CN.4/SR.311, 12 juin 1952]. Pour un résumé des discussions autour du premier alinéa de cet article 6 du PIDCP, ainsi que les renvois aux travaux préparatoires pertinents, cf. Marc Bossuyt, Guide to the « travaux préparatoires » of the International Covenant on Civil and Political Rights, Martinus Nijhoff Publishers, 1987, pp. 113-125.
  20. Dictionnaire Larousse, « arbitraire ».
  21. ONU, Commission des droits de l’Homme, Compte-rendu analytique de la 97e séance, U.N. Doc. E/CN.4/SR.97, 2 juin 1949, p. 6. Une position sur laquelle ils furent ensuite rejoints, notamment, par la Suède : ONU, Commission des droits de l’Homme, Compte-rendu analytique de la 98e séance, U.N. Doc. E/CN.4/SR.98, 2 juin 1949, p. 4 ; par l’Inde : ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent quarantième séance tenue à Lake Success, New-York, le jeudi 30 mars 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.140, 7 avr. 1950, § 14 (Lors d’une séance précédente, le représentant de l’Inde à la Commission demandait pourtant l’insertion du mot « arbitrairement » au sein de ce premier alinéa, cf. ONU, Commission des droits de l’Homme, Cinquième session, Compte-rendu analytique de la cent trente-cinquième séance tenue à Lake Success, New-York, le lundi 20 juin 1949, U.N. doc. E/CN.4/SR.140, 7 avr. 1950, p. 10) ; par le Liban : ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent quarantième séance tenue à Lake Success, New-York, le jeudi 30 mars 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.140, 7 avr. 1950, § 9 ; ou encore par l’Uruguay : ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent quarante-quatrième séance tenue à Lake Success, New-York, le lundi 3 avril 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.144, 12 avr. 1950, §§ 28-29.
  22. ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent trente-neuvième séance tenue à Lake Success, New-York, le jeudi 30 mars 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.139, 6 avr. 1950, § 17. Le Royaume-Uni propose d’ailleurs d’ajouter ce terme à l’alinéa premier de cet article, cf. ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième Session, Récapitulation des observations des gouvernements sur le projet de pacte international relatif aux droits de l’Homme et sur les projets de nouveaux articles, U.N. Doc. E/CN.4/365, 22 mars 1950, p. 26 ; une proposition soutenue par le Liban, ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent quarantième séance tenue à Lake Success, New-York, le jeudi 30 mars 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.140, 7 avr. 1950, § 9. La critique n’a pas non plus épargné la proposition du Royaume-Uni, M. Ordonneau – représentant de la France – soulignant que le terme « intentionnellement » pourrait permettre d’exclure du champ de protection de cet article les cas où la mort n’est pas infligée de façon intentionnelle, ce qu’il refuse [Id., § 35].
  23. ONU, Commission des droits de l’Homme, Compte-rendu analytique de la 311e séance, U.N. Doc. E/CN.4/SR.311, 12 juin 1952 : « Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie ».
  24. Brésil (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 811e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.811, 14 nov. 1957, § 33) ; Mexique (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 812e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.812, 14 nov. 1957, § 8) ; Grèce (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 812e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.812, 14 nov. 1957, § 33) ; Pologne (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 814e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.814, 18 nov. 1957, § 1) ; Russie (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 814e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.814, 18 nov. 1957, § 29).
  25. Irlande (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 813e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.813, 18 nov. 1957, § 42) ; Estonie (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 820e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.820, 21 nov. 1957, § 2).
  26. Chili (ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent quarantième séance tenue à Lake Success, New-York, le jeudi 30 mars 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.140, 7 avr. 1950, § 3) ; Royaume-Uni (ONU, AGNU, 3e Comité, Compte-rendu analytique de la 815e séance, U.N. Doc. A/C.3/SR.815, 19 nov. 1957, § 34).
  27. ONU, Commission des droits de l’Homme, Sixième session, Compte-rendu analytique de la cent trente-neuvième séance tenue à Lake Success, New-York, le jeudi 30 mars 1950, U.N. doc. E/CN.4/SR.139, 6 avr. 1950, § 8 : la Commission « prévoira la création d’un organisme international chargé d’attirer l’attention de l’opinion publique mondiale sur les actes des pays qui sont signataires du pacte. Cet organisme international et l’opinion publique détermineront aisément ce qui est arbitraire et ce qui ne l’est pas ».
  28. CDH, Observation générale n° 6 : Article 6 (Droit à la vie), 30 avr. 1982, U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.9 (vol. I), p. 204 ; CDH, Observation générale n° 14 : Article 6 (Droit à la vie), 9 nov. 1984, U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.9 (vol. I), p. 219. 
  29. CDH, Observation générale n° 16 : Article 17 (Droit au respect de la vie privée), 8 avr. 1988, U.N. Doc. HRI/GEN/1/Rev.9 (vol. I), p. 223 § 4. Lors de la création du Groupe de travail sur la détention arbitraire, la Commission des droits de l’Homme n’avait pas défini ce terme, mais elle avait considéré comme arbitraire toute privation de liberté jugée contraire aux normes internationales pertinentes, énoncées tant par la Déclaration universelle des droits de l’Homme que par toute autre norme internationale applicable, cf. ONU, Commission des droits de l’Homme, Résolution 1991/42, U.N. Doc. E/CN.4/RES/1991/42, 5 mars 1991 ; également ONU, Commission des droits de l’Homme,  Résolution 1997/50, U.N. Doc. E/CN.4/RES/1997/50, 15 avr. 1997. Une appréciation que reprendra le Groupe de travail sur la détention arbitraire, cf. ONU, Commission des droits de l’Homme, Rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire, U.N. Doc. E/CN.4/1992/20, 21 janv. 1992, Annexe I : Principes applicables pour l’examen des cas présentés au groupe de travail, p. 11. Plus récemment, le CEDAW a affirmé que « L’absence de réglementation concernant l’accès à l’avortement thérapeutique a soumis L. C. à l’arbitraire des agents de l’État », cf. CEDAW, L. C. c. Pérou, Communication n° 22/2009, U.N. Doc. CEDAW/C/50/D/22/2009, 17 oct. 2011, § 7.14.
  30. CDH, Draft general comment No. 36. Article 6: Right to life. Draft prepared by Yuval Shany and Nigel Rodley, Rapporteurs, U.N. Doc. CCPR/C/GC/R.36/Rev.2, 2 sept. 2015, § 18.
  31. Commission interaméricaine des droits de l’Homme, Final written arguments on merits and reparations in the case of : Hilaire, Constantine and Benjamin et al. against the Republic of Trinidad and Tobago, fév. 2002, p. 3.
  32. Sur cette question spécifique, on pourra se référer aux ouvrages de Caroline Picheral (dir.), Le droit à un procès équitable au sens du droit de l’Union européenne, Nemesis / Anthemis, 2012 ; Frédéric Sudre, Caroline Picheral (dir.), La diffusion du modèle européen du procès équitable, La Documentation française, 2003 ; ainsi qu’à la thèse de Abdelkrim Maamouri, Droit au procès équitable et due process of law : étude comparée : Etats-Unis, France et Convention européenne des droits de l’Homme, Aix-Marseille 3, 2010.
  33. Dans cette même affaire, mais cette fois devant la Cour interaméricaine, le juge Cançado Trindade indique dans une opinion concordante ce qu’il entend par arbitraire. C’est ainsi « whenever a legal procedure does not conform to the dictates of reason – as determined by the rectae rationis – but rather is issued only by the will of power (and the unlimited use of it). It is, thus, perfectly possible that an order is arbitrary, even though it is based on a positive law. This occurs when the dictates of said law are allowing to trump reason, obeying only the fortunate whim of the person in power ». Si cette formule semble reprendre le sens ordinaire du terme, elle se rapproche toutefois d’une vision jusnaturaliste du droit, où l’hypothétique norme transcendante conditionne la validité du droit positif. Une vision qu’Antônio Augusto Cançado Trindade, juge mais aussi professeur de droit, tend à porter dans ses opinions et travaux. Cf. notamment, son cour à l’Académie de droit international de la Haye : Antônio Augusto Cançado Trindade, « International Law for Humankind: Towards a New Jus Gentium », partie I, RCADI, tome 316, 2005, pp. 9-440 et partie II, RCADI, tome 317, 2005, pp. 9-312.
  34. CrEDH, Commission, 21 mai 1969, X. contre la Belgique, req. 2758/66 : « l’ensemble des circonstances, telles qu’elles ressortent tant du dossier que des exposés de la requérante elle-même, ne permet nullement de penser que le gendarme aurait eu l’intention de donner la mort, en d’autres termes, que la mort aurait été infligée intentionnellement, au sens de l’article 2, par. 1 (art. 2-1) de la Convention; qu’en conséquence, la Commission ne discerne aucune apparence de violation de l’article 2 de la Convention (art. 2) ». Dans cette affaire, ce constat au titre de l’article 2.1 amène étonnamment la Commission à ne pas juger les faits au regard des exceptions de l’article 2.2.
  35. CrEDH, Commission, 10 juil. 1984, Stewart c. Royaume-Uni, req. 10044/82, § 15.
  36. CrEDH, Grande chambre, 27 sept. 1995, McCann et autres c. Royaume-Uni, req. 18984/91, § 148 ; également CrEDH, Grande chambre, 27 juin 2000, Salman c. Turquie, req. 21986/93, § 98 ; CrEDH, 4 mai 2001, McKerr c. Royaume-Uni, req. 28883/95, § 110.
  37. CrEDH, 5 sept. 2002, Boso c. Italie, décision, req. 50490/99, § 1.
  38. CrEDH, Grande chambre, 20 déc. 2004, Makaratzis c. Grèce, req. 50385/99, § 58.
  39. CrEDH, Grande chambre, 6 juil. 2005, Natchova et autres c. Bulgarie, req. 43577/98 et 43579/98, § 97 ; également CrEDH, Grande chambre, 24 mars 2011, Giuliani et Gaggio c. Italie, req. 23458/02, § 209.

Pour citer cet article : Xavier Aurey, « Les notions d’intention et d’arbitraire en matière d’usage de la force meurtrière par l’Etat », Fondamentaux, 18 octobre 2018 [https://fondamentaux.org/?p=922]

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